Creepypasta FR : Un festin de Noël très particulier

Il a d’abord soupçonné qu’ils allaient le manger quand il a remarqué l’absence notable des délicieux fumets qui accompagnaient usuellement un festin de Noël. Ce n’était peut-être pas une pensée consciente, ou du moins, pas une qui était pleinement formée, mais il y avait un malaise croissant en lui. D’une certaine manière, il savait.

Si une famille vous invitait pour le dîner de Noël, la maison serait certainement remplie des merveilleux arômes associés à ce festin annuel ; une succulente dinde rôtie, des légumes glacés au miel, peut-être même la douce odeur du vin chaud. Mais non, tout ceci était absent.

Et pourtant, la table était dressée.

C’était un Noël particulièrement sombre, et si la neige était la bienvenue à cette période festive de l’année, le froid pénétrant et le gel qui semblaient nuire aux maisons ainsi qu’aux corps de ses habitants ne l’étaient pas. La température avait brusquement chuté le sept décembre, et il n’y avait aucun signe d’un éventuel sursis.

Les familles ont fait de leur mieux pour se rejoindre, mais pour beaucoup, ce serait un Noël solitaire. Voyager, surtout pour les personnes âgées, était presque impossible. Les températures dangereusement basses et la peur de glisser sur le verglas les immobilisaient. Une seule chute suffirait à fracturer une hanche ou une épaule, et pour les plus fragiles d’entre eux, se remettre d’une telle blessure n’était pas une tâche aisée.

La famille Cardinal avait pris en pitié un vieux monsieur qui avait récemment emménagé dans leur quartier, à quelques rues seulement de chez eux. Les Cardinal étaient très impliqués et prévenants, et avaient créé un petit groupe d’aide local qui avait pour but de s’occuper des personnes âgées vulnérables et passer du temps avec. Tout le monde les connaissait et les aimait.

Timmy était le plus jeune, un garçon d’à peine cinq ou six ans. C’était un enfant à qui tout le monde vouait une grande admiration. Il ne se plaignait jamais, ne causait jamais de problèmes et était toujours adorable. Sa grande sœur, Camille, âgée de dix ans, était tout autant admirée.

Ils étaient la preuve vivante des aptitudes parentales aimantes et bienveillantes de Ben et Lucy Cardinal.

Chaque année, à l’approche du froid hivernal, la famille Cardinal était admirée pour son dévouement et son engagement envers ses prochains. Pour leur passion, presque du zèle, à aider les moins chanceux. Mais derrière les sourires et la façade bien façonnée de famille aimante, se dissimulait un dessein bien plus sinistre.

Ils avaient une tradition annuelle, une façon de se récompenser pour leur gentillesse et leur générosité. Une tradition qui remontait à de nombreuses générations de la famille Cardinal. Chaque Noël, ils invitaient une personne à dîner. Elle serait accueillie à bras ouverts dans leur maison, installée confortablement à une table joliment dressée, et divertie par une conversation drôle et agréable de Noël. Puis, à la lumière du feu crépitant dans la cheminée, l’invité serait poignardé à mort, et mangé avec gratitude.

Ils étaient tous de fervents partisans de cette tradition, Timmy étant le plus impatient de tous. Il avait un appétit féroce, et un tour de taille assorti. Les parents adoraient voir leurs enfants aussi excités, et étaient ravis de voir leur petit garçon en pleine croissance dévorer avec autant d’enthousiasme.

Camille était d’une nature plus calme que son turbulent petit frère, silhouette frêle au teint pâle qui rappelait sa mère, mais ne vous y trompez pas ; elle adorait manger avec sa famille et pouvait réduire n’importe qui au silence avec une insulte froide et affûtée.

Ben était le chef de la police locale. De ce fait, dissimuler leur festin annuel était un jeu d’enfant. Lucy était, si l’on peut dire, celle qui entretenait les relations, et elle était particulièrement enthousiaste à l’idée de maintenir la tradition de Noël.

Leurs invités étaient invariablement ceux qui n’avaient aucune famille, et souvent d’un âge avancé. Oubliés par la société, laissés flétrir dans leurs petites maisons isolées. Ben expliquait chaque année à ses enfants que c’était une gentillesse, une bonne action de mettre fin à la misère grandissante de leurs victimes, et qu’en plus, ils allaient éventuellement mourir et seraient enterrés six pieds sous terre ou réduits en cendres ; quel gaspillage de bonne viande !

Cette année, Timmy et Camille étaient particulièrement excités. Leur mère faisait de son mieux pour essayer de les calmer, mais ce Noël-là, c’était presque impossible, car ils savaient ce qui les attendait le lendemain. La famille Cardinal accueillait un invité très spécial.

Il s’appelait Sergiu Moraru et venait d’Europe de l’Est. Ils n’avaient jamais eu de viande étrangère auparavant, et la simple idée de plonger dans ces muscles et cette graisse exotique a fait du festin de cette année un événement très attendu.

Ils avaient rencontré le vieux Moraru à peine quelques semaines auparavant, quand Ben a remarqué le nom inhabituel sur sa liste des aides à domicile. Chaque année à l’approche de Noël, les bénévoles de l’église locale se voyaient attribuer les noms et les adresses des retraités de la ville qui n’avaient aucune famille et qui seraient livrés à eux-mêmes pendant les fêtes. En cette période glaciale, inquiets que les habitants les plus fragiles succombent au froid mordant, les membres du comité de l’église rendaient visite à chacune de ces pauvres âmes isolées et leur offraient une oreille amicale, un coup de main, et de la nourriture consistante aux plus pauvres d’entre elles.

Les noms changeaient rarement, mais au moins une personne sur cette liste décédait malheureusement au cours de l’année. Étant un membre éminent de la communauté et un officier de police de haut rang, Ben informait souvent l’église qu’un de leurs protégés était malheureusement décédé, et sachant qu’il n’avait ni famille ni amis, il concoctait un mensonge impliquant généralement un fils ou une fille perdue de vue depuis longtemps, réapparus afin d’emmener le parent pour être enterré quelque part au loin. Ou alors, il disait qu’il avait simplement déménagé, ayant conclu un accord avec un agent immobilier local pour la vente de sa maison.

La famille n’était pas sans influence.

C’était incroyable de voir à quel point personne ne remettait en question ce que Ben disait. Les Cardinal prenaient bien soin que leur repas de Noël ne soit pas un membre actif de l’église ni de la communauté, et les gens présumaient que Ben savait forcément mieux.

Cette année, la famille espérait inviter Maria Rindridge pour écouter sa magnifique chanson de Noël, mais malheureusement, elle est décédée pendant l’été. Ben avait mené l’enquête et soupçonnait que quelqu’un s’était introduit chez elle, mais les causes de la mort semblaient naturelles.

Non, les Cardinal devraient trouver quelqu’un de différent pour le dîner. C’est à ce moment-là que le nom était apparu sur la liste :

« Sergiu Moraru, 86 ans. Emphysème léger, pas de famille. Ne connaît personne dans la région car il n’y a emménagé que récemment. »

Parfait.

Ben a découvert que M. Moraru était absolument charmant.  Bien qu’il soit visiblement très frêle, son esprit était toujours vif et il a régalé son interlocuteur avec de nombreuses histoires hautes en couleur à propos du « vieux pays », et des aventures qu’il a vécues lorsqu’il était dans la force de l’âge. Ses récits de guerre étaient particulièrement intéressants, et Ben était ravi de savoir que leur repas serait constitué d’un homme intelligent et cultivé.

Physiquement, il ne ressemblait à aucune de leurs précédentes victimes. Il était plutôt grand, bien que légèrement courbé par le poids de l’âge, avait un long nez tordu et un regard intense. Dans sa jeunesse, il devait être très intimidant. Cependant, son sourire aimable et sa silhouette fragile ne laissaient aucun doute à Ben sur le fait que ses enfants l’adoreraient. Ils appréciaient de manger ceux qui possédaient un caractère bienveillant et des manières douces.

Lui-même appréciait davantage la viande si elle venait d’une personne qui sortait de l’ordinaire et qui était dotée d’un esprit acéré, car la religion familiale – une religion qui avait réussi à rester invisible et influente au cours des siècles – affirmait que manger un autre être humain transmettait ses forces à ceux qui le dévoraient.

Comme beaucoup de ceux qui ne peuvent regarder que le passé plutôt que le futur, Sergiu Moraru a beaucoup apprécié la compagnie de Ben, et a été très touché quand il l’a invité à partager leur repas de Noël.

Le vieil homme était extrêmement fragile, il a eu besoin de l’aide de Ben et de Camille pour l’aider à sortir de chez lui, s’installer dans la voiture, puis pénétrer chez les Cardinal. Son emphysème était particulièrement mauvais ce jour-là, et chacun de ses pas était accompagné par le son de sa respiration difficile.

Chaque pièce de la maison des Cardinal était pleine de décorations de Noël plutôt banales, avec de nombreuses cartes ornant chaque table visible, montrant à quel point Ben et sa famille étaient populaires.

La table était joliment dressée avec une étoffe rouge, sur laquelle était posé un élégant ensemble de vaisselle de couleur crème. Le vieil homme a pu constater que les autres membres de la famille étaient tout aussi plaisants et agréables que Ben. Timmy et Camille étaient gentils et très bien élevés pour leur âge, l’aidant avec précaution à s’installer et remplissant son verre à chaque fois qu’il était vide.

Finalement, Lucy est apparue, portant un énorme plat. Il était inhabituellement grand, et pendant qu’elle s’asseyait à table, le vieux Moraru a surpris l’expression de son visage. C’était bref, et il a immédiatement essayé de le mettre sur le dos de son imagination, mais cela l’a profondément troublé. C’était comme si une blague était passée entre Lucy et ses enfants, une blague dont il était exclu. Un début de sourire, et pas un dans l’esprit de Noël. Plutôt un sourire méchant, qui ressemblait à celui d’un tyran conspirateur. Comme si Sergiu était la victime d’une farce, attendant d’être ridiculisé.

Alors que le malaise commençait à disparaître, Ben est apparu avec un grand couteau qui rappelait au vieil homme davantage un outil de boucher que l’ustensile nécessaire pour couper une dinde de taille décente.

Dinde qui brillait de plus en plus par son absence.

Ils restèrent assis pendant plus d’une heure, chaque membre de la famille Cardinal remplissant avec enthousiasme le verre du vieil homme et s’inquiétant de chaque toux ou respiration difficile. Mais c’était une étrange inquiétude.

Ils restèrent assis là, allègrement, posant à Moraru toutes sortes de questions puis écoutant les réponses concernant sa vie, où il avait vécu, à combien de batailles il avait participé. Mais l’intérêt semblait distant, d’une certaine manière. Il n’était que superficiel. À chaque fois que leur invité mentionnait le vieux pays, ces mêmes regards chargés de conspiration étaient échangés à travers la table, comme s’ils étaient excités non pas par le contenu de l’histoire, mais plutôt par le simple fait que Moraru soit un étranger.

L’absence non seulement de la nourriture, mais également de toute mention de celle-ci était déjà troublante, mais le fait que Ben jetât régulièrement des coups d’œil vers une horloge antique au-dessus de la cheminée était encore plus troublant. Ces regards étaient mal dissimulés, et trahissaient leur but : il comptait les minutes jusqu’à un événement. Même si l’homme n’avait aucune idée de quel événement il pouvait bien s’agir, il était persuadé que ce n’était pas lié à quelque chose en train de cuire dans le four.

Moraru savait qu’il n’y avait tout simplement aucune nourriture en train de rôtir, griller, ou même refroidir sur un rebord de fenêtre à proximité. Quelque soit le déroulement prévu de la soirée, cela n’impliquait pas un bon repas de Noël.

Camille a été la première à arrêter de sourire à ses anecdotes. Elle avait cessé d’écouter. Elle ne riait plus par politesse à ses blagues et ne semblait plus attendrie par la vision attachante d’un vieil homme radotant à cause de l’âge. Elle se contentait de le regarder fixement, de ses yeux sombres, froids et cruels. Un serpent avant une attaque.

Timmy a été le suivant à abandonner le rôle qu’il jouait, en souriant d’un air menaçant à Sergiu. Il a attrapé un couteau à viande et l’a serré intensément. Le plus alarmant était qu’il ne regardait pas le visage du vieil homme, mais son cou ridé.

Après un dernier coup d’œil à l’horloge, Ben a cessé d’être l’hôte attentif et jovial, et a commencé à caresser du bout des doigts le grand couteau devant lui, avec un mélange de colère et d’envie sur son visage.

Sergiu avait vu beaucoup de choses de son temps, mais rien d’aussi étrangement troublant que le spectacle qu’il avait devant lui.

Finalement, lorsque l’horloge a sonné, Lucy a abandonné à son tour son masque attachant, exposant la personnalité froide et tordue qu’elle cachait en-dessous.

Alors que la maison s’emplissait du son cristallin de l’horloge, un à un, perçants de symbolisme, chacun des Cardinal s’est levé de sa chaise, des couteaux affûtés à la main, et a attendu.

L’horloge a sonné une fois, et ils ont prononcé une phrase incompréhensible à l’unisson.

L’horloge a sonné deux fois, et le refrain féroce de leur chœur a augmenté en intensité.

L’horloge a sonné trois fois, et ils se sont tus.

Tous étaient silencieux, vidant la maison de ses sons, de son esprit de Noël, et d’une certaine manière, de son espoir. La respiration sifflante du vieil homme s’est intensifiée à cette vision singulière.

La famille a alors silencieusement contourné la table pour encercler leur invité. Au moment où le vieil homme allait demander ce qui allait advenir de lui, l’horloge a sonné une ultime fois. Le son était différent des précédents. Il était plus net, plus mauvais, et a résonné une fois et une fois seulement dans toute la maison des Cardinal.

Par derrière, Lucy a tranché la gorge du vieil homme d’une oreille à l’autre, pendant que Ben enfonçait son couteau profondément dans son estomac. Les deux parents ont ensuite retiré leurs couteaux et ont regardé avec fierté Camille le poignarder avec véhémence, alors que Timmy enfonçait sa propre arme dans les jambes, les bras, et le cou de Moraru.

Après quelques minutes, la frénésie a diminué avec la fatigue des enfants, et avec un dernier sursaut meurtrier, Timmy a planté son couteau si profondément dans la main du vieil homme qu’il l’a clouée à la table sur laquelle elle reposait.

Les enfants ont ensuite couru dans les bras de leurs parents. Ils ont tous échangé des étreintes en s’extasiant sur leur merveilleux jeu de Noël, et se réjouissant de pouvoir enfin goûter à cette succulente viande exotique.

Les bras enroulés autour des uns et des autres, ils ont fixé leur victime en riant à gorge déployée, commentant les histoires du vieil imbécile du passé, de la guerre et du vieux pays. Puis les rires ont diminué, pour partager un moment familial.

Alors qu’ils se fixaient en silence, ils ont réalisé que les rires ne s’étaient pas arrêtés. Une personne était encore en train de rire bruyamment. La confusion s’est transformée en horreur abjecte lorsque la vérité étrange s’est révélée : c’était M. Moraru.

Assis à table, couvert de sang, la tête penchée en arrière et l’entaille de sa gorge profondément ouverte, l’invité riait haut et fort. Un rire qui était à la fois jeune et vieux.

Sa tête est tombée vers l’avant alors qu’il retirait le couteau de Timmy de sa main, le faisant tomber au sol. Camille a hurlé, et Lucy s’est cachée derrière Ben. Ce qu’ils pensaient être un cadavre les regardait tous à présent, de la même manière qu’ils l’avaient regardé, avec le même but.

Timmy a mouillé son pantalon en pleurant alors que deux crocs précédemment rétractés émergeaient de la gencive supérieure du vieil homme, révélant un sourire terrifiant. Lucy a perdu connaissance lorsqu’il s’est relevé. Toute vieillesse disparue, l’invité des Cardinal s’est dressé de toute sa hauteur devant ses hôtes, ses yeux perçants évoquant des contes de pays, de décennies et de siècles d’existence.

Sergiu Moraru a bien mangé, ce Noël-là.

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7 Commentaires

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    • Crainartoxic Le 9 novembre 2023 à 18 h 45 min
    • Répondre

    Un noel Succulent pour de la viande exotique qui mange une viande locale !

    • Codark4 Le 25 septembre 2021 à 13 h 10 min
    • Répondre

    Merveilleux premier Noël de la région pour M.Moraru

      • Lãÿlã Le 28 septembre 2021 à 18 h 51 min
      • Répondre

      Je veux être ami avec ce mec enfaite

    • grosse queue Le 24 août 2020 à 14 h 17 min
    • Répondre

    c etait super sympa

    • donald trump d'elephants Le 27 avril 2020 à 19 h 33 min
    • Répondre

    la viande doit sentiraient fort dla pisse

    • Lycarus Le 16 avril 2020 à 10 h 22 min
    • Répondre

    Repas exceptionnellement intéressante 😉

      • Blabla Le 25 novembre 2020 à 16 h 44 min
      • Répondre

      Tels furent mangés qui crurent pouvoir manger !

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